Les Nnormal Kjerag sont sans doute les chaussures de trail les plus attendues de l’année avec les Salomon S-Lab Genesis. Déjà auréolées d’un beau petit palmarès avant même leur sortie officielle – puisque Kilian Jornet les a portées lors de ses victoires sur Zegama, la Hardrock et l’UTMB… -, les Kjerag s’affirment assurément comme la très bonne surprise de l’année 2022. Reprenant le nom d’une montagne située sur la côte ouest de la Norvège, les chaussures constituent clairement une très belle réussite et permettent à la nouvelle marque espagnole de parfaitement réussir son entrée sur le marché du trail (et, en même temps, de venir quelque peu le bousculer!). Un modèle qui, sur le papier, se définit comme un très beau concentré de technologies (tige Matryx, semelle Vibram Litebase, mousse Eexpure…) mais qui, sur le terrain, se révèle surtout être un véritable plaidoyer pour la polyvalence et le minimalisme… Bref, la Kjerag est une chaussure assez radicale, assurément inédite sur le marché et qui porte clairement la patte de Kilian! 

En Résumé

Une Chaussure assez Radicale et Minimaliste

S’il ne fallait qu’un terme pour décrire les Nnormal Kjerag, ce serait assurément le minimalisme. Ses concepteurs ont en effet opté pour un profil de semelle assez bas de 23,5 mm à l’arrière et de 17,5 mm à l’avant. On est ainsi assez proche du sol et on ressent particulièrement bien les aspérités du terrain lors de l’effort. Au niveau de la semelle intermédiaire, la chaussure est par ailleurs equipée du composé Eexpure, une nouvelle génération de mousse spécifiquement construite pour équiper les chaussures de trail et qui a la particularité d’être en contact direct avec la voûte plantaire. Pour le dire autrement, la chaussure ne comporte pas de semelle de propreté… le minimalisme est vraiment poussé jusqu’au bout! L’idée sous-jacente est de réduire le nombre de mouvements parasites, notamment le glissement du pied, pour gagner en transfert d’énergie. Les sensations sont en réalité un peu bizarres durant les premiers kilomètres mais le procédé s’avère assurément efficace. Nnormal a en fait pas mal communiqué sur l’Eexpure mais il faut avouer que le composé offre un résultat assez inédit. J’ai notamment trouvé qu’il offrait un très bon compromis entre rebond et propulsion : l’amorti est en fait assez modéré et plutôt dur tout en se répartissant assez équitablement entre le medio pied et le talon… mais l’Eexpure a aussi la propriété d’être assez flexible et ainsi de particulièrement bien renvoyer l’énergie. Bref, cela m’a pas mal rappelé la fermeté et le dynamisme du composé Pebax (qu’on retrouve par exemple sur les Dynafit Sky Dna) tout en y ajoutant plus d’épaisseur et de rebond! 

« La Kjerag est une chaussure qui nécessite “d’avoir du pied”. C’est un peu le lot des chaussures assez basses et légères mais leur relative flexibilité ne fait qu’accentuer cette radicalité! »

Du fait de son double rocker (l’incurvation de la semelle de chaque côté) légèrement prononcé, il s’agit également d’une chaussure qui privilégie une attaque médio-pied et donc plutôt inclinée pour aller de l’avant. Le rebond est toutefois suffisant à l’arrière pour permettre de se reposer progressivement sur le talon au fil des kilomètres, mais la Kjerag parait être une chaussure avant tout dynamique et taillée pour la performance. Le fait qu’elle apparaisse comme étant une des chaussures les plus légères du marché (seulement 210 grammes en taille 42 hommes) joue également beaucoup. De manière ambivalente, elle se révèle aussi comme une chaussure assez exigeante et en conséquence pas forcément réservée à toutes les catégories d’athlètes. Je dirais, pour simplifier, qu’il s’agit d’une chaussure qui nécessite “d’avoir du pied”. C’est un peu le lot des chaussures assez basses et légères mais la relative flexibilité des Kjerag ne fait qu’accentuer cette radicalité. A cet égard, elles ressemblent beaucoup aux Salomon S-Lab Pulsar SG (elles aussi très légères), tout en s’appuyant sur une base de semelle un peu plus large et un profil peu moins arrondi, mais il n’y clairement pas de hasard (Kilian Jornet avait contribué à leur création quand il courrait encore sous les couleurs de Salomon)! Comme les S-Lab Pulsar, les Kjerag offrent beaucoup de libertés aux pieds et des sensations assez naturelles mais supposent également d’avoir une cheville particulièrement musclée et une foulée assez aérienne… Bref, ce ne sont clairement pas des chaussures à mettre dans les pieds de coureurs occasionnels/débutants ou à la foulée assez lourde. En raison de leur amorti assez modéré et de leur légereté, je déconseillerais également les Kjerag aux coureurs lourds qui devront sans doute davantage s’orienter vers les Tomir au profil de semelle plus élevé!  

Une Chaussure Polyvalente sur le Plan des Distances, un peu moins du Point de Vue des Terrains!

L’autre trait distinctif des Nnormal Kjerag relève assurément de leur polyvalence. Au moment de leur sortie, Kilian Jornet avait d’ailleurs beaucoup insisté sur sa volonté, au travers des Kjerag, de proposer un modèle adapté aux différentes pratiques du trail-running. La Kjerag est en réalité avant tout polyvalente du point de vue des distances, même si sa radicalité en limitera clairement son usage sur ultras pour pas mal d’athlètes. Du fait de son dynamisme, c’est une chaussure qui me semble t-il exprimera tout son potentiel sur les formats courts – autour de 20-30 km, voir même sur des KV ou des petites skyraces – mais son rebond permettra également de la porter sans soucis sur des distances plus intermédiaires – sur des maratrail et assez au-dessus (jusqu’à 60-70 km). Les athlètes de milieu de peloton – comme moi – auront par contre plus de mal à les emmener sur des formats longs et encore plus sur ultras en raison de leur radicalité et de leur minimalisme. D’autres, plus proches du niveau des élites, y parviendront sans soucis. Bref, n’est pas Kilian qui veut… mais les chaussures offrent déjà aux athlètes la possibilité de s’exprimer sur un spectre assez large de distances, qualité qui n’est offerte au final que par un nombre assez réduit de modèles sur le marché! 

« La Kjerag est une chaussure qui se comporte aussi bien sur le plat que dans le dénivelé, tout en s’en sortant honorablement dans le technique… c’est suffisamment rare pour être souligné!

J’ai par contre été un peu plus déçu par les qualités d’accroche de la Kjerag. La chaussure est équipée du célèbre composé Vibram Megagrip avec procédé Litebase qui permet d’alléger le poids de la semelle d’environ 30%. Le haut de gamme a ici été privilégié mais le choix a toutefois été d’équiper la semelle de crampons assez peu proéminents (3,5 mm). Ils sont certes densément répartis (ils y en a 50) et assez agressifs mais l’option a été prise de dessiner la Kjerag pour qu’elle s’exprime clairement le mieux sur les terrains durs et compacts, qu’elle que soit d’ailleurs leur degré de technicité. Car c’est une chaussure que j’ai autant apprécié utiliser sur des parcours assez roulants et vallonnés que sur des petits singles – même situés en haute montagne -, tant que les sols restent assez compacts. Elles s’en sortent en effet aussi bien sur les pistes ouvertes et lisses, grâce à leur rebond, que sur des sols assez rocailleux et acérés, en raison de leur flexibilité. J’ai en effet particulièrement apprécié leur dextérité dans les sections techniques : la pose du pied est assez précise et leur souplesse permet de se faufiler assez facilement entre les obstacles tout en étant stables. Bref, une chaussure qui se comporte aussi bien sur le plat que dans le dénivelé, tout en s’en sortant honorablement dans le technique… c’est suffisamment rare pour être souligné! Leur adhérence se dégrade par contre assez nettement sur les terrains plus meubles: elle reste convenable lorsque les terrains demeurent secs et pas trop décomposés mais la semelle externe n’a par contre que très peu d’emprise lorsque les sols deviennent gras et boueux… C’est un peu le point noir des Kjerag à mon avis car cela limite assez nettement leur utilisation dans les conditions humides et hivernales, voir même dans les sous-bois aux sols très décomposés. Pour ce genre de conditions, les Tomir seront assurément plus adaptées!  

Le Confort Minimal mais Assuré! 

Le minimalisme a également primé pour dessiner le upper de la Kjerag et ainsi déterminer ses qualités de confort. On sent que ses concepteurs se sont assurés que la chaussure procure le minimum de confort qu’on est en droit d’attendre d’un modèle haut de gamme, mais sans véritablement plus, l’accent ayant été davantage mis sur son dynamisme et son agilité. La chaussure est ainsi équipée d’une tige en Matryx, plus précisément du composé Matryx Evo (qu’on retrouve sur la Genesis), encore plus fin et léger que le composé Matryx Micro (qui équipe les S-Lab Pulsar). Le maintien du pied est clairement bon, un peu moins qu’avec les chaussures équipées de tige unibody (comme la Salomon Pulsar Trail Pro ou les S-Lab Pulsar), mais cette configuration a le mérite d’offrir un poil plus de liberté au pied durant l’effort. A cet égard, j’ai particulièrement apprécié la languette des Kjerag, particulièrement fine et enveloppante, qui est un peu l’antithèse de celle épaisse et contraignante des Genesis. La tige est globalement assez souple et enveloppante, ce qui permet d’éviter tout forme de frottement ou de compression avec certaines parties du pied, ce qui n’est pas toujours le cas avec du Matryx… Des inserts en mousse ont été intelligemment disposés à l’interieur de la chaussure, à l’arrière, pour stabiliser au mieux la cheville. Par contre, c’est une chaussure avec laquelle j’ai mis un peu de temps à trouver le bon laçage. On voit ici un peu la différence par rapport au Quicklace ou à des systèmes un peu plus techniques. J’ai enfin apprécié la toe box que j’ai trouvé plutôt large et donc parfaitement adaptée à mes pieds assez évasés. Le chaussant est par ailleurs assez classique, de quoi convenir à tous les types de pieds, mais un peu plus large que celui des Salomon par exemple. J’ai seulement trouvé la coque talon un poil sérrée et pouvant entrainer quelques frottements lors des premières utilisations… mais rien de véritablement rédhibitoire ! 

« J’ai particulièrement apprécié la languette des Kjerag, particulièrement fine et enveloppante, qui est un peu l’antithèse de celle épaisse et contraignante des Genesis! »

Les qualités de protection de la chaussure sont également plutôt satisfaisantes mais là aussi on sent que Nnormal s’est un peu contenté du minimum. C’est de manière générale un défaut un peu typique des modèles polyvalents… J’avais en fait pas mal de craintes à ce sujet à la vue des premières images de la Kjerag mais la chaussure s’en sort en fait plutôt bien compte tenu de son gabarit. La tige a tout d’abord été renforcée avec des inserts en mousse à l’arrière ce qui permet de protéger les pieds des petits obstacles dans les singles plus ou moins techniques. Il y a quand même quelques angles morts sur ce plan, notamment à l’avant, même si le pare-pierres est assez large et solide. Des fils en kevlar (en jaune) viennent renforcer le milieu de la tige de la chaussure mais cela contribue surtout à améliorer sa durabilité à ces endroits. La chaussure manque, me semble–t-il, de quelques bandes en TPU thermocollées qui auraient permis de protéger plus sereinement les pieds des gros chocs, notamment en (haute) montagne… mais, pour un premier essai et un modèle par essence polyvalent, pouvait-on véritablement en attendre mieux? Espérons surtout que Nnormal va continuer à développer sa gamme de chaussures de trail et proposer des modèles plus spécifiquement adaptés à tous les types de terrains… car ce premier essai est assurément plus que prometteur!

Vidéo de Présentation

Où se les Procurer?

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Hommes Drop: 6 mm Poids: 216 g Hauteur Talon: 23,5 mm Fit: Standard Tige: Matryx Catégorie: Polyvalentes Usages: Distances Courtes à Intermédiaires/ Sentiers peu à très Techniques (Compacts) Prix: 180 euros

Femmes Drop: 6 mm Poids: 194 g Hauteur Talon: 23,5 mm Fit: Standard Tige: Matryx Catégorie: Polyvalentes Usages: Distances Courtes à Intermédiaires/ Sentiers peu à très Techniques (Compacts) Prix: 180 euros

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